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Le Cycle du Message Biblique "Le Message Biblique", au cœur de la collection du musée national Marc Chagall Marc Chagall commence à travailler sur le Message Biblique au début des années 1950, avec l'idée de rendre vie à la chapelle du Rosaire, abandonnée et fermée au culte. Il imagine pour la chapelle elle-même un vaste ensemble de peinture sur les thèmes de la Genèse et de l'Exode, chacune adaptée à la dimension des murs, et, pour la sacristie, cinq peintures plus petites pour le Cantique des Cantiques. Pourtant, avec l'avancement du travail, il préfère mettre l'accent sur la portée humaniste de ses œuvres en évitant de les accrocher dans un édifice religieux, comme l'était la chapelle, et décide finalement de les offrir à l'État français en 1966. Le cycle du Message Biblique comprend donc toujours deux parties, douze tableaux illustrant la Genèse et l'Exode, les deux premiers livres de la Bible, présentés dans la grande salle du musée, et cinq tableaux évoquant le Cantique des Cantiques dans une salle hexagonale voisine.
Dans le magnifique cadre du musée d'Art et d'Histoire du judaïsme à Paris, une exposition d'une rare profondeur nous décrypte la relation personnelle de Chagall, peintre russe et juif, avec la Bible, sa source d'inspiration. L'art du peintre Marc Chagall (1887-1985), russe et juif, est d'une originalité telle qu'on le reconnaît immédiatement; et il touche autant les chrétiens que les juifs. C'est l'homme des paradoxes. D'abord il y a ce mélange de gaieté primesautière et de tragique, d'innocence enfantine telle un conte de fées, et de la gravité la plus sombre, celle de quelqu'un qui a connu les grands totalitarismes du XXe siècle; coexistence aussi de l'emploi des couleurs les plus lumineuses et de la noirceur qui symbolise le mal et la mort, en des clairs-obscurs qui en font par moments un Rembrandt du XXe siècle. Puis comme artiste, il est moderne et même révolutionnaire, tout en restant, à l'heure de l'abstraction, figuratif et narratif, mais en truffant ses œuvres de symboles. Juif croyant, mais contournant allègrement dans son œuvre l'interdiction de la représentation de Dieu et des êtres célestes, au point que les anges sont parmi les principaux protagonistes de sa peinture.
Alors que les artistes du XXe siècle sont attirés par l'abstraction, Chagall est résolument attaché à la figuration et à la narration. Et dans une époque qui tourne le dos au religieux, il reste convaincu que l'art doit être porteur de sens. "Chagall voulait montrer que la Bible porte un message universel, souligne Laurence Sigal. Sa démarche n'est pas religieuse mais plutôt animée par un discours de Paix. » Et c'est dans cette volonté d'universalité et de dialogue interreligieux qu'il peint un Christ judaïsé avec un talit (châle de prière). « Il a voulu employer le langage des chrétiens pour leur parler. Cette représentation du Christ crucifié, inspirée par les pogroms de Russie, devient un emblème de la souffrance du peuple juif en particulier et de l'humanité en général », poursuit Laurence Sigal. Ainsi, doublement transgressive, cette image rappelle aux chrétiens que Jésus était juif et en même temps, elle bouscule des siècles d'antijudaïsme et de persécutions. Toujours audacieux et mué par un profond désir de réconciliation, Chagall participe au renouveau de l'art sacré chrétien en France, sous l'impulsion du Père Couturier au début des années 1950.
L'exposition, qui célèbre sa relation intime et durable avec l'écrit et le livre, a permis de regrouper plus de cent ouvrages illustrés en édition originale à tirage limité. Les œuvres exposées seront renouvelées au cours de l'exposition qui comprendra deux accrochages: du 7 mai au 29 août 2022 et du 3 septembre au 9 janvier 2023. Musée national Chagall, "Chagall en éditions limitées" à voir jusqu'au 9 janvier